Le code des communes a introduit en 1953 une distinction statutaire entre sapeurs-pompiers professionnels et sapeurs-pompiers non professionnels. D’aucuns en déduisent une dichotomie qu’ils souhaiteraient voir énoncer plus clairement à l’instar de beaucoup de pays d’Europe. N’a-t-on vu certains journalistes parler récemment avec mépris des « pompiers des champs » rudimentaires à comparer à des « pompiers des villes » héroïsés véritables « robocop » des temps modernes ?
La Fédération, en s’appuyant sur une compréhension de notre histoire et de nos valeurs, et sur les textes législatifs dont tous les attendus répètent de 1790 à 2011 que l’engagement citoyen est la base de notre modèle des secours, parle de « complémentarité ». Il n’y a, en effet, une même origine, une même histoire, un même parcours commun entre sapeurs-pompiers professionnels et volontaires, les uns s’appuyant sur l’expérience d’un grand nombre d’interventions et de pratiques pour faire valoir la palette de moyens qu’ils savent mettre en œuvre, les autres sur leur connaissance du milieu dans lequel ils vivent et les apports de la profession qu’ils exercent ! Mais les deux ont le même champ de compétence sur un même espace géographique avec une même ambition : la distribution d’un secours équitable pour tous les français, performant avec la rapidité, donc la proximité, comme première référence.
Nous sommes au cœur du modèle français des secours.
Pourtant, comme dans tous les autres pays d’Europe, nous sommes partis d’une pratique sociétale de l’extinction des incendies (toute la population) pour parvenir à une spécialité. Le fait qui provoque la bascule est la révolution industrielle. Chez les pompiers européens cette révolution industrielle est arrivée avec « la pompe à bras » à la fin du XVIIe siècle. Le schéma d’évolution classique était la spécialisation puis l’occupation à temps plein, puis le métier, enfin la profession. Les modèles anglais, allemand ou autre issus de cette révolution industrielle ont conduit à un système de supplémentation : c’est-à-dire deux groupes de pompiers : les professionnels et les volontaires qui œuvrent ensemble, pour une partie de leurs missions uniquement !
En Angleterre, les volontaires sont les supplétifs des professionnels. En Allemagne, ils en sont les auxiliaires.
Ce n’est pas le cas de la France, parce que dans notre pays, au moment où la révolution industrielle allait imposer sa marque, est venue la révolution politique, avec la mise en place de la « modernité » comme base philosophique d’un état ! Une philosophie laïque basée sur la recherche d’un bonheur collectif, grâce au progrès technique, au pragmatisme certes, mais surtout grâce à l’engagement de l’individu pour les autres qui, de ce fait, devient un citoyen ! C’est l’histoire des fédérations de 1789 et 1790 avec le fameux 14 juillet 1790 ! La loi sur les communes, où la lutte contre les incendies, les fléaux calamiteux et les accidents est confiée au maire avec les habitants de la communauté de vie, date du 16 au 24 août 1790. Ce n’est pas qu’une coïncidence. C’est tout un esprit !
Et c’est définitif, le secours en France reposera désormais sur l’engagement du citoyen pour les autres, l’effort de la Nation pour les siens, avec le don de soi et l’engagement en une équipe. Le terme sapeurs-pompiers ne peut se comprendre qu’au pluriel ! Les lois de 1884, 1996, 2004 et 2011 reprendront ces mêmes principe,s en faisant une des bases de notre République.
Les pompiers professionnels, issus de pompiers casernés dans certaines grandes villes comme Bordeaux depuis 1885, constituent une extraordinaire adaptation pragmatique de ce principe à un contexte où les interventions sont trop nombreuses pour la disponibilité de volontaires. Les sapeurs-pompiers volontaires en demeurent les gardiens tutélaires. Les deux procèdent du même engagement citoyen, des mêmes valeurs immarcescibles.
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